Nous commémorons ces jours la triple catastrophe de Fukushima. Il y a 10 ans, début avril, un paysan Japonais mettait fin à ses jours par le traditionnel seppuku.
Son geste m’avait inspiré ce court texte.
J’ai mal au monde
J’ai mal aux lèvres sanguinolentes qui s’ouvrent sur les entrailles de ce paysan japonais
J’ai mal à la plaie qu’il s’est infligé d’un coup de sabre sans appel et sans espoir
J’ai mal à ses boyaux répandus par terre
Cette terre qu’avant lui son grand-père et son père se sont efforcés de garder pure
Dans le respect des cycles naturels
Dans le respect de la vie
J’ai mal au respect de la vie
J’ai mal à ces champs qui ne nourriront plus personne pendant combien de temps
J’ai mal à ma conscience infirme maillon infime et impuissant dans la chaîne des responsabilités qui entrave tout le monde et n’arrête pas les rayons
J’ai mal à ma douleur car mon frigo est bien rempli et relié au secteur tout comme mes radiateurs et mes ordinateurs
J’ai mal à l’hypocrisie de ceux qui décident qui signent qui décrètent qui avalisent
J’ai mal à la brutalité intangible de leur marge brute opérationnelle
J’ai mal aux dividendes de leurs actionnaires
J’ai mal à leur incompétence
Ont-ils seulement songé à épandre leur sang pour amender la terre ?
J’ai mal à leur impunité
Dans le silence des limbes du néant Dieu a mal au monde et il pleure en hurlant son Amour plus fort que jamais
Puissent ses larmes laver le sang des paysans en même temps que leur terre
Et noyer au passage ceux qui font mal au monde
Avril 2011